Février 2020
Le Programme Man & Nature développe une approche novatrice de conservation de la biodiversité qui s’appuie sur la valorisation économique des ressources naturelles. Sa stratégie repose en particulier sur le soutien à une exploitation comprise et raisonnée des ressources naturelles et à un revenu équitable pour les communautés locales du Sud, en partenariat avec les entreprises privées ;
En 2019, la collecte de fonds du programme Man and Nature s’est élevé à 570 000 € et notre contribution directe aux projets de terrain à 485 000 €. 9 programmes ont été engagés dans 7 pays (3 régions).
Asie
En Inde, le projet a pour objectif de lutter contre les trois facteurs, braconnage, pesticides et exploitation forestière, responsables de l’extinction des Loris (Loris tardigradus ssp : UICN : EN). Le projet est mis en œuvre auprès de trois communautés et 24 villages qui vivent dans ou à proximité de la forêt Ayyalur (Tamil Nadu). Il bénéficie directement à 450 familles et à la population des Loris par la conservation et la régénération de leur habitat.
Grâce aux partenaires engagés, SEEDs Trust (partenaire technique) et la Fondation Maisons du Monde (partenaires financier), le projet a obtenu de très bons résultats :
- 854 agriculteurs (565 hommes et 289 femmes) ont été formés à l’agriculture sans pesticides ;
- 22 producteurs vendent leur production dans le cadre d'un forum de marché bio ;
- sur les 9 collines suivies, le nombre de Loris a augmenté de 30% entre 2015 et 2019
- 24 195 arbres ont été plantés sur des terres agricoles (dont 2 000 arbres de Santal et 7 065 Tamariniers).
- Les 150 femmes formées et équipées à la transformation des PFNL ont commencé la commercialisation collective ;
- 60 femmes ont été formées à l'apiculture et se sont constituées en entreprise sociale afin de vendre leur miel.
En Malaisie, le projet se concentre sur le grand prédateur fortement menacé qu’est le tigre de Malaisie (UICN : EN). Il a pour objectif de restaurer le corridor écologique de Sungai Yu pour permettre à la faune sauvage de se déplacer entre les deux ensembles forestiers de Main Range et Taman Negara sans risque. Pour cela, il est nécessaire de développer des activités génératrices de revenus pour les communautés locales, de les sensibiliser à l’importance de la conservation de la biodiversité et de les impliquer dans la surveillance et la restauration du corridor écologique, ce qui participe également à la diminution du braconnage.
Grâce aux partenaires engagés, La Société Malaisienne de la Nature (MNS) (partenaire technique) et la Fondation Maisons du Monde (partenaires financier), le projet a obtenu les résultats suivants :
- 10% de revenus supplémentaires (soit 855€ par mois) pour les 40 membres impliqués dans le Groupe d’Action Communautaire « Les Amis du Tigre » ont pu être générés par la plantation d'arbres communautaires et les activités de soutien aux moyens de subsistance des femmes ;
- Les activités de sensibilisation ont atteint 240 membres des communautés locales et 4700 personnes issues du grand public.
Afrique Centrale
Au Cameroun le programme Man and Nature intervient en périphérie de la réserve du Dja. Cette zone de conservation est soumise à une dégradation continue du fait de l’augmentation de la population rurale et de la surexploitation des ressources naturelles. Cette pression constante condamne un peu plus les populations autochtones. Les Pygmées Baka, qui ont toujours chassé et collecté de nombreux produits dans la forêt, voient maintenant leurs activités interdites : chasse de subsistance, collecte d’herbes médicinales, de plantes alimentaires ou autres. Pour soutenir ces communautés, notre partenaire technique, l’ONG AAFEBEN appuie 10 groupements de la région de Lomié, comprenant 350 femmes des ethnies Baka et Bantou dans la collecte et la commercialisation des Produits Forestiers Non Ligneux (PFNL) tels que le Mbalaka, la Mangue sauvage ou le Moabi.
Le programme soutenu par la Fondation Sisley, a permis de :
- Renouvellement du partenariat innovent entre l’entreprise forestière Pallisco, AAFEBEN et la coopérative de femmes, dans le but de développer un prélèvement durable des PFNL et de limiter le braconnage ;
- 9 145€ de CA généré par la collecte de mangues sauvages (Irvingia gabonensis). La fermeture des frontières avec le Nigéria n’a pas permis la commercialisation des autres PFNL alors stockés ;
- 344 femmes ont été formées dans la collecte et la transformation des PFNL ;
- 325€ épargnés par 80 membres Bakas dans une « caisse villageoise ». L’épargne villageoise est un concept nouveau pour les Baka qui ont pu acheter des produits de première nécessité.
- Actualisation des plans simples de gestion dans 4 forêts communautaires pour l’amélioration de la gouvernance et la participation des communautés à la gestion de leur forêt.
Dans la zone Tridom (Ouest Cameroun, Nord Gabon), grâce à l’appui de la Fondation Franklinia, Noé mets en œuvre un programme de conservation de deux espèces sacrées et mythiques pour les communautés locales et peuples autochtones qui l’utilisent à des fins médicinales et spirituelles : le Moabi (Baillonella toxisperma) et le Kévazingo (Guibourtia Tessmanii). Le projet a pour objectif de lutter contre l’exploitation illégale de ces deux essences en :
- Développant un statut de protection de l’espèce Moabi au Cameroun en démontrant que l’exploitation de ses graines par les populations locales apporte une valeur ajoutée plus importante à l’économie locale que l’exportation de son bois. Ces activités sont réalisées par nos partenaires : le Centre pour l'Environnement et de Développement (CED) et Tropical Forest and Rural Development (TFRD).
- Renforçant la société civile gabonaise et les communautés locales à la lutte contre l’exploitation illégale du Kévazingo afin de garantir que les mesures prises par le gouvernement gabonais pour la protection de l’espèce soient respectées. Ces activités sont mises en œuvre par notre partenaire, Brainforest.
Le programme ayant démarré fin 2019, les premiers résultats seront disponibles mi-2020.
Au Nord Gabon, dans la province du Woleu-Ntem, afin de lutter contre la déforestation et la pauvreté, le projet mis en œuvre par Brainforest, vise à améliorer la productivité des exploitations de cacao villageoises, mais surtout à encourager la pratique de l’agroforesterie pour une production de qualité, durable et sans déforestation. Le cacao sous ombrage étant reconnu pour sa qualité supérieure, cela permettra aux producteurs d’accéder à un marché fiable et rentable. Ce projet pilot permettra de réhabiter 40ha de cacaoyères, de plaidoyer pour une amélioration du système d’achat du cacao au Gabon, et de démontrer qu’il est possible et nécessaire de répliquer ce modèle dans les autres villages de la région.
Grâce au partenaire financier, la Fondation Maisons du Monde, les activités suivantes ont pu être réalisées ;
- 1 étude socio-économique a été menée afin d’évaluer les forces et faiblesses des plantations et planteurs identifiés dans les 4 villages du projet ;
- 24 personnes ont suivi un atelier de formation sur les techniques de production durable du cacao.
- 16 lots d’équipement agricole et 2 motos bennes utilisés pour la culture de cacao ont été distribués ;
- 18 producteurs ont participé à une formation sur la réhabilitation d’anciennes cacaoyères, selon une méthode participative « champ-école-paysan » ;
- Des actions de plaidoyers pour améliorer le système d’achat du cacao.
En RDC, depuis 2017, Noé et la Fondation Maisons du Monde appuient l’association Mbou Mon Tour dans le but de protéger le Bonobo par une gouvernance communautaire de la forêt et un développement économique local durable. Le projet est particulièrement original en ceci qu’il met en place des Forêts Communautaires Locales (FCL), c’est-à-dire qu’il permet à des populations autochtones de devenir les uniques propriétaires et gestionnaires de leur forêt. Le projet a obtenu les résultats suivants :
- Une zone commune de conservation de 84 735 ha a été identifiée, créée, validée et surveillée par les communautés locales (42 pisteurs formés et équipés) ;
- En 2 ans, dans la zone de suivi, le nombre de bonobo à augmenter de 17% ;
- Le nombre de pièges détectés a baissé de 75% depuis 2016, en partie grâce aux patrouilles régulières anti-braconnage ;
- 60 personnes ont été formées sur la fabrication des tissus en raphia et transformation de ces tissus en objet ;
- La base vie de MMT a été équipé en énergie solaire et alimentée en eau ;
- Les groupements d’épargne (60 femmes au total) ont permis le financement de champs communautaires de manioc, d’arachide et de maïs.
Perspectives
Grâce à l’obtention de financements auprès de l’Agence Française de Développement (AFD), Noé va renforcer ces activités au Cameroun, en soutenant la mise en place de filières bio (cacao, PFNL et Karité) en périphérie de deux Aires Protégées : le Parc National de la Bénoué et la Réserve de Biosphère du Dja. Ce programme de 3 ans et demi soutiendra au moins 600 producteurs, dont plus de 60% femmes.
En Afrique de l'Ouest
Le Programme ECONOBIO d’une durée de 3 ans (janvier 2018 - décembre 2020) a pour objectif de développer des filières durables autour d’aires protégées, avec le concours de cinq ONG : A Rocha Ghana, Nature Conservation Research Centre (NCRC), Northcode, West African Primate Conservation Action (WAPCA) au Ghana et le Centre Suisse de Recherches Scientifiques en Côte d’Ivoire (CSRS). Il vise spécifiquement à :
- Contribuer au développement de cinq filières durables autour de trois aires protégées : beurre de karité et miel autour du Parc National de Molé, cacao autour de l’Aire de Conservation de Kakum, huile de coco, cacao et manioc autour de la forêt transfrontalière de Kwabre-Tanoé.
- Améliorer la conservation de la biodiversité par les communautés et l'utilisation durable des ressources naturelles. Le projet soutient la mise en place et le renforcement de structures de gouvernance communautaire (Community Resource Management Area - CREMA) afin d'assurer la gestion durable des ressources naturelles.
- Renforcer les acteurs de la société civile, générer des connaissances et partager les meilleures pratiques pour aider à relever les défis actuels et futurs de la conservation de la biodiversité et du développement économique.
Ce programme est cofinancé par l’Agence Française de Développement (AFD), le Critical Ecosystem Partnership Fund (CEPF), Sofi Tucker Foundation, Phytodess, NaHÉ Cosmétiques et la Fondation de France.
En combinant les modèles de CREMA[1] et de développement de filières vertes, les résultats suivants ont été obtenus en 2019 :
- 147,000 hectares de terres gérées de manière durable par les communautés locales ;
- 5 filières vertes développées ;
- 4647 producteurs formés et dotés de moyens de subsistance accrus (dont 44% de femmes) ;
- 477 membres élus des communautés formés et soutenus (dont 26% de femmes) ;
- 75 patrouilleurs formés et opérationnels et 1250 patrouilles réalisées ;
- 2 centres de production construits (une d’huile de coco bio et équitable et un de miel).
[1] La zone de gestion des ressources communautaires (CREMA) est un mécanisme de gouvernance et de gestion communautaire des ressources naturelles